5 juin 2018 : Momie égyptienne, Henri IV, Richard Coeur de Lion ou plus récemment Adolph Hitler… Philippe Charlier (40 ans) a le don pour faire parler les cadavres les plus célèbres. Médecin légiste, mais également anthropologue et archéologue, celui qui présente désormais le Magazine de la santé sur France 5 explore la mort à sa manière.
Il fait partie de l’équipe des cinq chercheurs qui ont récemment confirmé que les restes humains conservés en Russie depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale étaient bien ceux d’Adolf Hitler. En comparant des radiographies, des résidus de tartre dentaire et les traces laissées par des prothèses dentaires uniques, Philippe Charlier et ses collègues ont déterminé que ces restes ne pouvaient appartenir à nul autre qu’à l’ancien dirigeant allemand, contredisant les théories qui disaient qu’Hitler avait fui vers l’Argentine après la guerre. “Les dents sont authentiques, il n’y a aucun doute possible. Notre étude prouve bien que Hitler est mort en 1945”, confirmait-il à l’AFP il y a deux semaines.
Passionné d’archéologie, le gamin de Meaux découvre ses premiers ossements humains dans un chantier de fouilles archéologiques à l’âge de 12 ans. Fils d’un père médecin et d’une mère pharmacienne, Philippe Charlier baigne dans une atmosphère médicale et décide de suivre cette voie toute tracée en devenant médecin légiste, fasciné par l’idée que le corps envoie des messages et que le médecin est là pour les attraper.
Interne à l’hôpital de Lille, Philippe Charlier se fait connaître alors qu’il tente de percer les mystères de la mort brutale d’Agnès Sorel, favorite de Charles VII, morte en 1450. De la “Dame de beauté”, il ne reste qu’un crâne, quelques dents, des lambeaux de peau et de muscles momifiés, et des cheveux épars. Des échantillons suffisants pour Philippe Charlier et l’équipe de 21 chercheurs qui concluent, en 2006, qu’Agnès Sorel est morte empoisonnée au mercure, sans que l’on sache s’il s’agit d’un acte criminel ou d’une intoxication.
ENQUÊTE EN HAÏTI SUR DES PATIENTS CONSIDÉRÉS COMME DES ZOMBIS
Initiateur et organisateur des colloques internationaux de pathographie (branche de la paléopathologie qui s’intéresse, comme elle, à l’étude médicale de restes humains anciens), ses divers travaux portent ensuite sur l’étude des restes de Richard Cœur de Lion, de Foulque III Nerra, Comte d’Anjou, de Diane de Poitiers, des reliques de Louis IX dispersées partout en France, les authentifiant au passage en collaboration avec d’autres spécialistes, des fausses reliques de Jeanne d’Arc. En décembre 2010, le médecin légiste authentifie un crâne retrouvé chez un particulier deux ans auparavant, l’attribuant au célèbre roi de France Henri V, assassiné par Ravaillac en 1610. Le légiste et son équipe s’appuient sur une vingtaine d’arguments pour le prouver : lobe d’oreille percé, état bucco-dentaire dégradé, datation au carbone 14 compatible, reconstitution faciale satisfaisante…
“Je m’interroge tous les jours sur la mort, dans la relation professionnelle et personnelle que j’entretiens avec les cadavres humains…”, lâche-t-il au micro de France Culture. Aujourd’hui chef du service d’anthropologie médicale au Centre d’accueil et de services hospitaliers de Nanterre, il est également maître de conférences à l’université de Versailles. En plus de cela, Philippe Charlier est aussi médecin à la maison d’arrêt de Nanterre et anime désormais l’émission “Le magazine de la santé” sur France 5 chaque mardi. Dans son dernier ouvrage, “Zombis : enquête anthropologique sur les morts-vivants”, paru aux éditions Tallandier en 2018, Philippe Charlier enquête même en Haïti, interroge des prêtres vaudou, assiste à des funérailles et examine des patients considérés comme zombis.
Thibault Girardet (rédaction btlv/source France Info)
