Alors que nous avons reçu des partisans de la conscience extraneuronale comme Mario Beauregard, une étude menée avec l’aimable autorisation de l’Institut Allen, vise à mieux comprendre la nature même de la conscience en s’appuyant sur deux théories concurrentes.
Deux théories concurrentes de la conscience ont été confrontées l’une à l’autre dans le cadre d’un effort de recherche pluriannuel. La première, la théorie de l’information intégrée (TII), suggère que la conscience naît lorsque les informations cérébrales sont fortement connectées et unifiées. La deuxième, la théorie de l’espace de travail neuronal global (ETGN), suggère que la conscience naît de l’information portée à l’esprit par un réseau de différentes zones cérébrales.
LA CONSCIENCE ENFIN COMPRISE ?
Les résultats de cette étude, commencée en 2018, ont révélé des perspectives intéressantes comme l’indique le communiqué de presse : « La recherche a montré qu’il existe une connexion fonctionnelle entre les neurones des zones visuelles précoces du cerveau (les zones qui traitent la vision, situées à l’arrière du cerveau) et les zones frontales du cerveau, ce qui nous aide à comprendre comment nos perceptions sont liées à nos pensées »,
« Ces résultats minimisent l’importance du cortex préfrontal dans la conscience, suggérant que, bien qu’il soit important pour le raisonnement et la planification, la conscience elle-même pourrait être liée au traitement sensoriel et à la perception… en d’autres termes, l’intelligence concerne l’action, tandis que la conscience concerne l’être. »
Malgré toutes ces analyses, aucune des deux théories concurrentes n’a pu être confirmée ni infirmée comme l’a déclaré Anil Seth, professeur de neurosciences cognitives et computationnelles à l’Université du Sussex : « Il était clair qu’aucune expérience ne pouvait à elle seule réfuter définitivement l’une ou l’autre de ces théories…les théories sont tout simplement trop différentes dans leurs hypothèses et leurs objectifs explicatifs, et les méthodes expérimentales disponibles trop approximatives, pour permettre à une théorie de l’emporter définitivement sur une autre. »
« Cela étant dit, les résultats de cette collaboration restent extrêmement précieux : nous avons beaucoup appris sur les deux théories et sur où et quand, dans le cerveau, les informations relatives à l’expérience visuelle peuvent être décodées. »
LA CONSCIENCE RÉUNIT LES CHERCHEURS
L’étude a porté sur 256 sujets , un résultat sans précédent pour ce type d’expérience. Les chercheurs leur ont présenté divers stimuli visuels, puis ont utilisé trois instruments de mesure du cerveau humain courants, qui mesurent le flux sanguin ainsi que l’activité magnétique et électrique, pour étudier leur cerveau pendant qu’ils observaient les stimuli.
Cette expérience est le résultat d’une collaboration scientifique ouverte à grande échelle qui a débuté lors d’un atelier à l’Institut Allen en 2018. Ce projet a réussi à réunir des chercheurs ayant des perspectives différentes pour tester deux théories dans un environnement collaboratif, mais critique, visant à réduire le biais de confirmation et à accélérer les progrès scientifiques.
LA THÉORIE DE LA CONSCIENCE EXTRANEURONALE
Certains chercheurs prennent le contre-pied de ceux deux théories et affirment que la conscience pourrait exister indépendamment du cerveau. Pour eux, la conscience n’est pas générée par le cerveau, mais par un phénomène extraneuronal.
La théorie de la conscience extraneuronale a vu le jour grâce à l’intuition d’un neurochirurgien américain, le Dr Michael Egnor. Ce dernier a mis en avant des faits étranges relevés dans la littérature scientifique qui pourraient soutenir cette idée : des patients semblent en effet avoir une conscience active en dehors de leur corps. C’est par exemple le cas de ces personnes qui ont vécu une expérience de mort imminente (EMI) et qui rapportent avoir vu des événements de leur propre point de vue, alors qu’elles étaient cliniquement mortes.
Michael Egnor n’est pas le seul à défendre cette théorie. D’autres chercheurs tels que les biologistes David J. Chalmers et Stuart Hameroff ou encore le physicien Roger Penrose ont eux aussi misés sur l’idée que la conscience pourrait exister indépendamment du cerveau. Selon eux, la conscience émerge d’un phénomène quantique se déroulant dans les microtubules (ndlr : des structures filamenteuses constituées de protéines) des neurones et ne peut être expliquée par des phénomènes purement biochimiques.
Le Dr Egnor et ses collègues affirment que ce phénomène pourrait être lié à l’activité électrique collective des neurones dans leurs réseaux :
« Nous soutenons que la conscience émerge d’un phénomène extraneuronale – un phénomène qui n’est pas lié aux propriétés individuelles des neurones – qui résulte de l’activité collective des neurones dans leurs réseaux », écrivent-ils.
Cela signifie que la conscience émerge non pas d’un processus particulier dans les neurones eux-mêmes, mais plutôt d’un phénomène qui résulte de l’interaction collective de nombreux neurones agissant ensemble dans leurs réseaux.
LA CONSCIENCE ET LES NEURONES
Bien que cette théorie s’oppose à celle selon laquelle la conscience est générée par les neurones eux-mêmes, les auteurs admettent que les neurones jouent un rôle important dans la production de la conscience. Ils soutiennent également que ce phénomène extraneuronal est en quelque sorte lié aux propriétés physiques des neurones.
De nombreuses théories tentent d’expliquer comment les réseaux de neurones peuvent produire des éléments composant notre conscience (perception sensorielle, mémoire, pensée abstraite…). Elles suggèrent que notre cerveau constitue une sorte d’interface entre deux réalités : celle des signaux électrochimiques internes au cerveau et celle du monde extérieur. Cette interface permettrait à notre cerveau de produire une image consciente du monde tel qu’il est réellement. Pour ne rien manquer de l’actualité liée à la conscience, inscrivez-vous à la newsletter btlv.
Bob Bellanca (rédaction btlv source Allen Institute – photo home page @btlv)
