Comment devenir une civilisation de type I ?

22 avril 2022 – Depuis son apparition la civilisation humaine a cherché à exploiter au mieux l’énergie. Avec les nouvelles technologies ses capacités à le faire a augmenté. Si on envisage que la vie se soit développée ailleurs, on doit prendre en compte que des éventuelles civilisations extraterrestres en fassent tout autant.

Pour le moment, notre civilisation n’a pas le niveau. Un constat qui découle de l’échelle de Kardachev. Présentée en 1964 par l’astronome soviétique Nikolaï Kardachev, elle permet de classer « théoriquement » les civilisations dans l’univers selon leur niveau de développement technologique et leur consommation énergétique.

Kardachev a imaginé trois types de civilisations :

• Le type I, capable de stocker et d’exploiter toute l’énergie disponible sur sa planète, et même la quantité d’énergie stellaire qui parvient jusqu’à elle.

• Le type II, qui peut consommer directement l’énergie d’une étoile.

• le type III, qui est en mesure de capter la totalité de l’énergie émise par sa galaxie.

Revue par le célèbre astronome Carl Sagan en 1973, lui propose une classification plus fine, intégrant des paliers intermédiaires entre les trois types.

Pour le Dr Jonathan H. Jiang du Jet Propulsion Laboratory de la NASA et ses collaborateurs :

« Pas avant l’année 2371 ». C’est la conclusion d’une étude qu’il a mené et publiée sur le serveur arXiv.

Il va donc falloir encore attendre 350 ans avant que les Terriens puissent exploiter et stocker toute l’énergie disponible sur Terre. Devant un tel calendrier, les scientifiques soulignent le fait que notre évolution doit intégrer une transformation énergétique majeure.

Parmi les critères qui permettent d’évaluer l’évolution d’une civilisation, le niveau de consommation d’énergie apparaît comme une mesure approximative fiable des avancées technologiques. On note aussi la formation et la chute des empires, les capacités technologiques et la croissance démographique, etc.

« Civilisation planétaire » c’est ainsi qu’on la nomme. Une civilisation de type I est caractérisée par une puissance énergétique de 1016 W. Une puissance qu’elle trouve dans toutes les sources disponibles sur la planète, comme les combustibles fossiles, le nucléaire, l’éolien, le solaire, le géothermique et l’hydrolien. Et sans oublier l’énergie fournie par son étoile mère, comme notre soleil qui nous envoie un rayonnement d’une puissance moyenne de 1361 W/m².

Une civilisation de type II est en théorie capable de collecter toute la puissance de son étoile, soit environ 1026 W. Pour cela, elle doit se doter de technologies et d’infrastructures colossales comme, par exemple, la sphère de Dyson qui entourerait le soleil. Une étoile comme la nôtre génère une puissance d’environ 4 × 1026 W, ce qui est énorme.

Une civilisation de type 3 dite « galactique » peut théoriquement exploiter une puissance équivalente à 1036 W. Elle doit être en mesure de stocker et exploiter la luminosité de notre Voie lactée qui correspond à environ 4 x 1037 W.

De nos jours, et selon les données de l’Agence internationale de l’énergie, nous exploitons environ 1013 W. Cela veut dire que sur l’échelle élaborée par Carl Sagan, nous n’avons pas le niveau pour prétendre à être une civilisation de type I, puisque nous nous plaçons exactement au palier 0,728 de l’échelle de Kardachev. Avec notre consommation, qui s’élève à 0,16% de la puissance disponible, nous sommes donc bien loin du type I.

La question est de savoir si nous pourrions un jour y parvenir ? C’est ce qu’a tenté de découvrir une équipe internationale de chercheurs, dirigée par le Dr Jonathan H. Jiang du Jet Propulsion Laboratory de la NASA.

Avec ses collaborateurs, il a analysé la consommation et l’approvisionnement en énergie issue des trois sources les plus importantes comme le gaz, le pétrole, le charbon, mais également l’énergie nucléaire et les énergies renouvelables, dans le but d’examiner l’évolution de chacune de ces sources. Dans ce cadre, l’équipe souligne qu’elle a fait en fonctions des impératifs du moment :

« Nous avons aussi pris en compte les limites environnementales suggérées par la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, l’Agence internationale de l’énergie et celles spécifiques à nos calculs ».

Comme on peut le voir avec le dérèglement climatique que nous subissons actuellement, chaque source d’énergie a ses limites. Un usage excessif des énergies fossiles a des effets dévastateurs sur le climat, ce qui pourrait entraîner à terme l’extinction de l’humanité avant même qu’elle devienne une civilisation de type I.

C’est une des raisons qui devraient nous inciter à tenir compte des niveaux d’émissions de gaz à effets de serre, donc de pollution, engendrées par chaque source d’énergie pour estimer la date à laquelle l’humanité pourrait basculer vers le type I.

« Nos résultats suggèrent que la meilleure estimation pour ce jour ne viendra pas avant l’année 2371 », en conclut l’équipe.

Malgré tout, pour les chercheurs, rien ne sert de s’inquiéter. De nombreux progrès technologiques, comme par exemple l’informatique, reposent sur une efficacité accrue alliée à une consommation énergétique plus faible. En clair, nous n’aurons pas nécessairement besoin d’exploiter plus de puissance pour continuer à progresser.

L’étude du Dr Jonathan H. Jiang met en lumière l’importance d’une transition énergétique majeure à l’échelle mondiale, en particulier dans les années 2030. Le scientifique et ses collaborateurs assurent que si cette transition énergétique entraînera dans un premier temps une faible remontée sur l’échelle de Kardachev ou une stagnation, voire même une descente, elle reste l’atout le plus sûr pour éviter les obstacles environnementaux causés par les combustibles fossiles.

Bob Bellanca (rédaction btlv.fr Source arXiv)