13 février 2025 – Alors que la nuit s’installe sur le désert d’Atacama, quatre télescopes de l’Observatoire de Paranal au Chili s’apprêtent à observer un ciel d’une pureté et d’une richesse étoilée inégalée.
Cependant, cette installation de l’Observatoire Européen Austral (ESO) est menacée par un projet énergétique de grande envergure qui pourrait entraîner une pollution lumineuse néfaste pour l’astronomie. L’Observatoire de Paranal, perché à 2635 mètres d’altitude, offre une vue exceptionnelle de la Voie lactée et des ciels parmi les plus sombres et dégagés du monde, comme l’indique Itziar de Gregorio, astronome de l’ESO. Malheureusement, une usine dédiée aux énergies renouvelables doit être construite à proximité de cet endroit privilégié. Ce projet s’inscrit dans le cadre du programme chilien visant à remplacer les énergies fossiles d’ici 2050.
Les astronomes craignent que cette usine ne génère une pollution lumineuse, compromettant l’observation de phénomènes célestes tels que les pluies de météores et les éclipses. La pollution lumineuse, souvent liée à l’éclairage public et aux panneaux publicitaires, perturbe également les cycles de sommeil des humains et déroute les oiseaux migrateurs. Bien que souvent ignorée, elle a des conséquences significatives.
Daniela Gonzalez, de la Fondation Cielos de Chile, souligne que la pollution lumineuse est souvent sous-estimée, comparant sa visibilité à celle d’un robinet qui fuit. Elle explique que, contrairement à une fuite d’eau évidente, la pollution lumineuse n’est pas perçue comme un problème.
L’Observatoire de Paranal est un lieu de recherche intensif la nuit, où astronomes et ingénieurs explorent l’univers. Selon Steffen Mieske, responsable des opérations scientifiques, les recherches couvrent une vaste gamme de phénomènes, des planètes et comètes aux trous noirs et à la recherche de vie extraterrestre. L’Observatoire de Paranal est situé dans le désert d’Atacama, connu pour ses conditions d’observation exceptionnelles grâce à son altitude et à sa faible pollution lumineuse. Cependant, la construction de l’usine pourrait compromettre cette situation. Récemment, une lettre ouverte signée par des astronomes, des scientifiques et des artistes a exprimé des inquiétudes concernant l’impact potentiel de ce projet sur l’observation astronomique.
Le projet, soutenu par AES Andes, filiale chilienne de la société américaine AES Corporation, prévoit la création d’une usine sur 3000 hectares. Cette usine sera dédiée à la production d’hydrogène et d’ammoniac verts, au développement de l’énergie solaire et éolienne, ainsi qu’au stockage d’énergie par batteries. Cependant, il existe un désaccord concernant la distance entre l’usine et l’Observatoire. AES Andes estime cette distance entre 20 et 30 km, tandis que les chercheurs la chiffrent à moins de 11 km. Bien qu’ils ne s’opposent pas au projet, ils demandent la création d’une zone d’exclusion lumineuse pour protéger l’Observatoire. AES Andes a déclaré que son projet respecterait les normes d’éclairage les plus strictes et se conformerait aux réglementations gouvernementales en matière de protection des sites d’observation astronomique.
Le projet est actuellement en phase d’évaluation environnementale et ne devrait pas obtenir de permis d’exploitation avant deux ou trois ans. Pendant ce temps, le télescope géant européen (ELT), le plus grand télescope optique du monde, est en construction dans les montagnes du Cerro Armazones, près de l’Observatoire. Les scientifiques craignent que le projet énergétique n’interfère avec le fonctionnement de ce télescope, dont le lancement est prévu en 2028. Itziar de Gregorio met en garde contre les conséquences de l’augmentation de la pollution lumineuse dans cette région unique, soulignant que cela pourrait retarder la compréhension de la vie dans l’univers, un sujet de recherche crucial pour les astronomes. Pour ne rien louper de l’actualité liée à l’astronomie, inscrivez-vous à la newsletter btlv.
Bob Bellanca (rédaction btlv source AFP)